Photojournalisme Maintenant: Vendredi Round Up – 4 février 2022

Bienvenue au premier Photojournalisme Maintenant: Vendredi Round Up pour 2022. Tout d’abord, je souhaite à tous une bonne année!

2022 marque la dixième année pour le photojournalisme Maintenant et au cours de la dernière décennie, j’ai écrit des histoires sur des centaines de photojournalistes, de photographes de documentaires sociaux et d’artistes photo. Cela a été un véritable travail d’amour de vous apporter ces histoires du monde entier et de mettre en lumière la diversité de la narration photographique.

Après une décennie de publication presque tous les vendredis, en 2022, je vais publier le premier et le troisième vendredi de chaque mois pendant que je termine la rédaction de ma thèse de doctorat de 80 000 mots. Beaucoup d’entre vous suivent depuis 2012 et je sais que vous soutiendrez ce changement. Je vous remercie de votre soutien continu.

Alison Stieven-Taylor

Et donc au premier poste pour 2022. Cette semaine, une critique du nouveau livre de Sandro Miller: Couronnes: Mes Cheveux Mon Âme Ma Liberté.

Critique: Livre

Couronnes: Mes Cheveux Mon Âme Ma Liberté – Sandro Miller

Souvent, la créativité est inspirée par des conversations avec ceux dont nous sommes proches, l’intimité permettant des révélations qui pourraient ne pas se produire autrement. En 2016, Sandro Miller, photographe américain primé, et son épouse Claude-Aline discutaient des cheveux, un sujet apparemment prosaïque. Claude-Aline, une femme afro-américaine, a raconté comment elle voyait ses cheveux comme étant “la manifestation de mon âme passée, présente et toujours exposée. »Pendant qu’elle parlait, une idée a commencé à prendre forme. 

Couronnes: Mes Cheveux Mon Âme Ma Liberté c’est le résultat d’un projet de trois ans qui a vu Sandro créer plus de 100 portraits de femmes noires et leurs magnifiques coiffures sculptées. Couronne est une histoire qui célèbre les femmes noires, leur pouvoir, leur histoire et leur culture exprimés dans des portraits qui capturent l’individualité de la gardienne. La photographie est étonnante comme on peut s’y attendre d’un artiste comme Sandro, ses projets passés tels que Malkovich, Malkovich, Malkovich: Hommage aux Maîtres de la Photographie, informant nos attentes. Chacun de ces portraits est une œuvre d’art.

L’essence de la femme photographiée, sa douleur et sa joie, sa résilience extraordinaire, sa compréhension de soi et sa détermination sont véhiculées dans chaque image. Tournés sur des décors illustratifs vibrants qui font écho au pop art ou à des fonds noirs unis, ces portraits permettent à chaque femme d’exprimer sa majesté.   

Couronne comprend également des citations de certaines de celles illustrées fournissant des informations fascinantes qui donnent au livre encore plus de profondeur. Les femmes décrivent leurs cheveux avec révérence“ « ma magie » (Ava), ”ma plus grande fierté“ (Ipeleng), ”mon lustre d’espoir » (Keke). D’autres partagent la douleur d’être séparés ou victimes d’intimidation à cause de leurs cheveux. Nia raconte que “Au collège, mes cheveux étaient tressés et en cornrows. Les garçons m’ont taquiné en m’appelant « Tresses du Ghetto. » J’étais jeune et cela m’a vraiment fait mal. »Tadi dit“ « J’étais confus quand j’étais enfant parce que toutes mes poupées avaient de longs cheveux blonds raides. Mes cheveux étaient un afro noir court.” 

Comme le démontrent ces citations, Couronne est également une fenêtre sur une histoire beaucoup plus large sur le racisme dont les femmes noires ont été victimes pendant de nombreuses décennies. C’est à travers cette collection de mots et d’images que Couronne devient une thèse puissante sur la signification des cheveux d’une femme noire, comme déclaration personnelle de style et comme véhicule pour comprendre les associations émotionnelles, spirituelles et ancestrales profondes que ces femmes ont à leurs couronnes. Comme l’écrit Mimi “Mes cheveux ont un lien fort avec mon origine ancestrale, ce qui me permet de rester connecté au vivant et au non-vivant.”  

Couronne a été tourné à Chicago (États-Unis), Dakar (Sénégal) et Johannesburg (Afrique du Sud). Dans chaque lieu, Sandro a réuni des équipes de coiffure et de maquillage et a jeté le filet large pour les participants, garantissant la diversité. Il a fait appel au soutien de l’actrice américaine Angela Bassett qui, dans son avant-propos du livre, partage ses réflexions sur le “pouvoir de transformation” des cheveux d’une femme noire. ”Aucune autre femme sur la planète ne peut exprimer son individualité et sa créativité via les follicules qui lui caressent la tête comme la femme noire », écrit Bassett. Les images de Sandro en sont la confirmation sans équivoque.

Poème imposant de la poétesse américaine Patricia Smith, Sieste Déchaînée, qui a été composé pour Couronne, encapsule la lutte et le pouvoir des femmes noires, présentant les cheveux comme un tissage mystique du cœur et de l’âme, un portail à travers lequel les femmes noires se connaissent et affirment leur pouvoir. C’est une écriture brillante et émouvante. Pour citer Sieste Déchaînée:

Quand nous avons commencé, nos cheveux étaient furieux et tressés épais contre la broche des hommes. Notre couronne de chaos se déchaîne encore, la sieste se déchaîne, et nous explosons, toujours nous-mêmes à nouveau, une seule âme, mais aucun de nous n’est le même. C’est néon, rasé, serti et noué, bouclé et enroulé, c’est tout mais toujours noir, nos cheveux sont le funk, le brûlot, le grognement d’Aretha, c’est doucement infernal sur nos têtes parfaites…  

Publié par SKIRA, Couronnes: Mes Cheveux Mon Âme Ma Liberté est présenté sous forme de couverture rigide avec étui, en français et en anglais. Le grand format permet aux portraits de s’élever de chaque page, et la reproduction de l’image est irréprochable. 

Au-delà de sa beauté, Couronne est un livre qui suscitera des conversations importantes et apportera de nouvelles compréhensions à ce que signifie être une femme noire.  

Éditeur : SKIRA aux éditions française et anglaise

Pages: 168

Dimensions : 30,5 x 35,1 cm

Illustrations en couleurs : 140

Taille: 30,5 x 35,1 cm

Cette revue a été publiée pour la première fois dans L’Oeil de la Photographie en français et en anglais, le 20 janvier 2022